Cette
fois Mike entame sa quatorzième saison, la deuxième
sous le maillot des Washington Wizards. A l'aube de ses 40 ans,
et malgrès un genou fragile, Jordan rempli encore les salles
NBA à lui tout seul. Son temps de jeu est réduit,
mais il compte jouer de plus en plus au cours de la saison. Pour
ses premiers matches, il a quand même réussi à
plusieurs reprise, à marquer plus de 20 points en 20 minutes
de jeu. Les jeunes pousses ont encore beaucoup à apprendre
avant de pouvoir être comparer au maître.
«
Il ne faut jamais sous-estimer Michael, même à 50 ans,
il sera meilleur que la moitié des joueurs NBA. » A
l'annonce du retour aux affaires de Michael Jordan, l'hommage au
Maître est sorti tout naturellement de la bouche du MVP 2001,
Allen Iverson.
Qui a dit que la nouvelle génération ne respectait
personne? Cette déférence des jeunes loups de la Grande
Ligue envers le vieux lion ne risque pas de se répéter
dans les mois à venir. De tout cela, Jordan s'en moque. Ayant
décidé de revenir en NBA après trois années
en stand-by Sa Majesté a succombé au démon
de la balle orange.
«Je reviens en tant que joueur pour l'amour du jeu »
a annoncé Jordan. « Je ne reviens pas pour l'argent,
ni pour la gloire, j'ai déjà connu tout cela. Je reviens
pour le challenge. L'Amérique est un pays libre où
tout individu a le droit de faire ce qu'il veuf. C'est tout ce que
je veux faire, je veux juste essayer de jouer au basket-ball. »
On peut comprendre le désir de jouer du natif de Brooklyn,
mais au regard de sa superbe carrière, toute l'Amérique
du sport s'interroge sur le bien fondé de cette décision.
Avec
les Chicago Bulls, Jordan a remporté six titres de champion
NBA (en 1991,92, 93,96, 97 et 98). il a été élu
cinq fois meilleur joueur du championnat, tout en cumulant dix sacres
de meilleur marqueur de la ligue. Jordan s'était retiré
après avoir inscrit le shoot du titre lors des Finales de
1998. Pourquoi gâcher une telle apothéose? Et surtout,
pourquoi avoir attendu (gâché?) trois longues saisons
avant de se décider?
«Quand je me suis retiré la dernière fois, je
n'ai jamais dit que j'étais prêt à quitter le
jeu «, a avoué ce dernier. «Je ressens encore
une démangeaison et je ne veux pas ressentir cette gène
jusqu'à la fin de ma vie.
Alors que cette démangeaison se faisait discrète depuis
1999, l'eczéma NBA a fait une furieuse réapparition
à l'orée de l'année 2001. Le facteur déclenchant
ayant pour nom... Marie Lemieux. Qui ça ? Sorte de Michael
Jordan du hockey, toutes proportions gardées. Lemieux avait
surpris tout son monde la saison dernière en revenant sur
les patinoires de la NHL, trois années après avoir
pris sa retraite. A l'instar de Jordan actionnaire au sein des Wizards,
Lemieux était propriétaire de l'équipe des
Pittsburgh Penguins au moment de son retour. Proche de Sa Majesté,
le Canadien n'a pas arrêté, tout au long de la saison,
de confier à Jordan tout le plaisir qu'il éprouvait
à rechausser des patins. « En écoutant l'enthousiasme
de Mario, j'ai fini par retrouver l'envie de jouer «, expliquait
Jordan, qui a du revendre ses, actions des Wizards afin d'avoir
l'autorisation de rejouer en NBA. «Tout est parti de là
!
Au regard de la superbe saison de Marie Lemieux avec les Penguins.
ces derniers n'ayant échoué qu'en demi-finales des
playoffs contres les New Jersey Devils, Michael Jordan a été
conforté dans ses aspirations de come-back.
Cependant, là où Lemieux intégrait une solide
équipe de Pittsburgh comptant dans ses rangs l'un des meilleurs
joueurs du championnat en la personne de Jagomir Jagr, Jordan va
devoir évaluer au sein des limités Washington Wlzards.
Une dure réalité. Concrètement, cela signifie
plus de Pippen et de Rodman. Plus dérangeant, le Maître
Zen Phil Jackson officie désormais du côté de
la côte Pacifique. chez les champions en titre, les Los Angeles
Lakers. A Washington, Jordan va devoir composer avec les errances
d'une équipe ayant concédé 63 défaites
la saison dernière. Ses nouveaux coéquipiers sont
inconnus de tous. Qui sont Richard Hamilton, Courtney Alexander,
Jahidi White et Kwame Brown? Des joueurs pleins de potentiel certes,
mais sans réelle expérience NBA. Un seul nom titille
l'oreille des connaisseurs, celui de l'entraîneur Doug Collins.
Et nous parlons là d'un coach incapable de remporter le titre
NBA ou d'amener les Chicago Bulls aux NBA Finals, avec des joueurs
du calibre de Jordan, Scottie Pippen et Horace Grant dans son équipe.
Rassurant? Pas vraiment. Nullement naïf, Jordan a conscience
des difficultés qu'il s'apprête à affronter.
«Je ne me lance pas dans cette aventure en pensant que je
vais échouer », clame t-il. «Je sais que je n'ai
plus 25 ans mois je sens que je peux encore jouer à un haut
niveau. Je n'ai pas peur de l'échec, Si je peux arriver à
jouer tant mieux sinon tant pis, ce sera tout de même bien.
Et puis, personne ne peut me retirer mes six titres de champion
et tout ce que j'ai accompli... D'après ce que vous dites
(les journalistes), nous n'allons même pas remporter 30 matches.
Et ça, c'est un challenge. Je ne dis pas que nous allons
terminer la saison à 50-32, mais je pense que nous pouvons
avoir un bien meilleur résultat que 19-63. »
Dans une conférence Est régénérée
et affichant un niveau de jeu nettement plus élevé
que l'an dernier, il ne sera pas facile d'atteindre les playoffs
pour les troupes de Jordan. Une jeune équipe de Washington
dont une bonne partie des cadres a été recrutée
par MJ, alors qu'il occupait le poste de Président des opérations
basket des Wizards. La relation que va établir le «
Patron » avec ses joueurs sera déterminante pour la
suite du championnat. La plupart des kids de Washington ont grandi
en adorant Jordan, en accrochant des posters de lui dans leur chambre.
Aujourd'hui, ils ont la chance de jouer avec lui. Le choc des générations
promet des instants mémorables. «Je le regarde dans
le bus et je me dis 'Man, c'est Michael Jordan’, » s’enthousiasme
le pivot Brendan Haywood. « Après je suis dans l’avion
assis à côté de lui et je ne peut m’empécher
de le regarder avec admiration, c'est bizarre. » Connu pour
son intransigeance et sa quête de perfection lorsqu’il
évoluait à Chicago, Jordan va devoir tempérer
son penchant pour les critiques. Il va lui falloir s’habituer
aux affres de la défaite.
« Les Wizards vont être sous le choc en découvrant
son éthique de travail et son professionnalisme »,
confesse un ancien coéquipier de Son Altesse, Jud Buechler.»
Moi-même, je n'ai jamais rien vu de tel depuis. Il est difficile
de dire ce qu'il va se passer. L'année dernière. il
était le patron on dehors du terrain et il s'était
énervé à plusieurs reprises auprès de
ses joueurs, maintenant il est avec eux. J'espère que les
jeunes vont réaliser la chance qu'ils ont de jouer avec lui.
Quand j'étais un rookie, je me précipitais vers les
vétérans pour avoir des conseils des meilleurs vétérans.
Ils vont devoir faire de même et ne pas le lâcher une
seconde, observer tous ses mouvements.»
Choisi à la première place de la dernière draft
par Michael Jordan, Kwame Brown ne pouvait rêver d'un meilleur
tutorat. Désireux d'infuser son savoir dans les neurones
des jeunes apprentis basketteurs des Wizards, Jordan va grandement
influencer l'avenir de ses « employés ». Le titre
est hors de question pour MJ mais sa contribution au sein des Wizards
peut avoir un impact dans toute la ligue.
« Aujourd'hui nous avons beaucoup de rebelles dans la ligue,
mais Michael était aussi un rebelle à ses débuts
», analyse Ray Allen. «il a donné le ton d'une
nouvelle folie. d'une nouvelle mode et tout cela a été
positif pour le jeu. Il a tout fait pour que le basket-ball soit
reconnu à sa Juste valeur. Et les gens sont contents de voir
ces valeurs revenir en NBA, cela va servir d'inspiration à
beaucoup de jeunes.»
D'autres jeunes en quête de reconnaissance seront moins admiratifs,
moins respectueux devant le savoir du Maître. Beaucoup d'observateurs
se demandent comment les «vieilles jambes » de Jordan
vont tenir le choc d'une longue saison comptant 82 matches et surtout
comment il va composer devant l'incroyable densité athlétique
des Carter, Bryant et McGrady. Certains aigris annoncent même
de sérieuses bastonnades en perspective pour notre vétéran.
«Vous dites que les jeunes chiens vont me courir après.
Mais je ne fuis personne ! Vous dites que Kobe Bryant et Tracy McGrady
vont me battre. Et bien. je suis prêt à relever le
challenge. Je sais de quoi je suis capable. Tous les joueurs sont
motivés à l'idée de m'affronter, mais cela
était déjà le cas avant que je ne prenne ma
retraite. Donc rien n'a vraiment changé.» Une chose
diffère cependant. Jordan est âgé de 38 ans.
Dans un sport basé sur le défi athlétique.
cette donnée a toute son importance. Autrefois le terrain
de jeu attitré de MJ. la NBA a vu d'autres personnalités
s'ériger en son absence. Vassaux dociles du temps de son
règne, Kobe Bryant. Allen Iverson, Vince Carter, Tracy McGrady
sont désormais des stars à part entière de
la Ligue. Plus jeunes, plus hype, plus funky, ces derniers entendent
bien faire mordre la poussière au vieux lion. « C'est
une ligue différente ». affirme Dcc Rivers. coach d'Orlando
et mentor des merveilles Tracy McGrady et Grant HiII.
Le changement était en marche quand Michael est parti, et
maintenant, les stars du championnat ont totalement changé.
L'époque où les Reggie Miller, Tim Hardaway, Karl
Malone, John Stockton et autre Gary Payton dominaient la ligue est
révolue. Les derniers Playoffs avec les défaites au
premier tour de places fortes comme Indiana, Miami, Utah et New
York en ont apporté la preuve.
Objets ces dernières années des critiques perpétuelles
de la presse, les nouvelles stars de la NBA voient le come-back
de Jordan comme une véritable aubaine. L'occasion de s'affranchir
de l'aura étouffante, du dieu Jordan. Certains comme Vince
Carter et Kobe Bryant ont même été critiqués
sans ménagement par Jordan.
Depuis trois ans, peu importe la qualité de leur jeu, à
chaque fois, les jeunots se voyaient rappeler sans ménagement
qu'ils n'étaient pas aussi bon que Jordan, qu'ils ne travaillaient
pas aussi dur et n'étaient pas aussi concentrés.
Ultime affront, depuis le départ de Jordan la NBA a mauvaise
mine, les salles se sont vidées et les taux d'audiences sont
en baisse. Fait révélateur, les dernières NBA
finals ont attiré 4 millions de spectateurs de moins que
lors des Finals de 1998, les dernières disputées par
Jordan. Une désertion des fans symbolisant une incapacités
à reprendre le flambeau.
"Dans le passé, ces jeunes gars ont du combattre l'image
infaillible de Michael Jordan, c'est dur", analyse le propriétaire
des Dallas Mavericks, Mark Cuban. "Comment voulez vous battre
quelqu'un qui ne joue même pas?"
Jordan est désormais là en cible désignée.
Et tout les joueurs de la grande ligue ne rêvent que d'une
chose, lui faire mordre la poussière.
"Cela va être difficile pour lui, je n'aimerai pas être
à sa place", compatit le meneur des Houston Rockets,
Steve Francis. A chaque match, pendant toute la saison, il va affronter
un joueur surmotivivé à l'idée de le battre."
"Il y a trois ans, la plupart de ces joueurs avaient encore
peur du maître, plus maintenant" renchérie l'ancien
coach de Georgetown John Thompson. " La plupart de ces jeunes
joueurs était encore des bébés quand Jordan
est parti, maintenant ils sont habités par une confiance
sans égale. J'attends avec impatience de voir comment Michael
va se comporte. Une chose est sûre, vous n'allez pas lui marcher
dessus facilement."
Les premières images des entraînements de Jordan nous
ont permis de découvrir un joueur affuté physiquement,
ayant effectué un gros travail en musculation et plutôt
vif dans ses démarrages.. L'embonpoint et les joues rebondies
aperçus lors du dernier All Star Game de Washington ont disparu.
"Il a fait de très belles passes et à chaque
fois qu'un gars provoquait une faute et n'arrivait pas à
conclure l'action, il ne se gênait pas pour lui faire une
remarque. Tout en restant à chaque fois positif", analysait
l'intérieur Popeye Jones à l'issus du premier practice."
Et à la fin de l'entraînement je peut vous dire qu'à
chaque fois qu'il délivrais une passe le gars marquait!"
" Michael joue comme un quaterback" renchérissait
Doug Collins." Il explique à Kwaime Brown comment se
placer et comment il faut jouer."
Affichant un bouc grisonnant, Jordan, qui va désormais évoluer
au poste d'ailier meneur, se déclarait ravis par sa première
prise de contacts avec ses employés." C'était
amusant d'aller sur le parquet et de faire de nouveau ces exercices",
avouait Jordan. " Certain était plus difficiles que
d'autres, mais c'est vraiment la manière la plus rapide de
retrouver la forme... Je réalise que ces joueurs sont jeunes
et qu'ils vont apprendre. Ma patience sera grande. Je dois leur
donner une chance de grandir."
Prometteur, il faudra toutefois attendre la mi-saison pour se faire
une véritable idée du niveau de Jordan. Alors que
ce training camp se tenait dans la petite université de North
Carolina Wilmington, la folie inhérente au personnage Jordan
a vu un total édifiant de 250 journalistes se faire accréditer
ainsi qu'une foule de 3 000 personnes tenter d'accéder au
gymnase. Une première pour les Wizards. Excitant, surprenant,
le show Jordan ne fait que commencer.